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Le mythe de l’identité arabo-musulmane

Beaucoup de partis politiques en Tunisie ou en Égypte parlent de l’identité arabo-musulmane, comme unique identité qu’il ne faut pas modifier dans la constitution, car elle représente la réelle identité du peuple.

Le mythe de l’identité arabo-musulmane

Le mythe de l’identité arabo-musulmane

Depuis l’indépendance et jusqu’à aujourd’hui, la question de l’identité arabo-musulmane reste une revendication de tous les partis politiques et du peuple et reste pour eux une vérité sacrée est requise, la seule issue pour nous protéger de tout effacement culturel, même après le soulèvement contre les dictatures.

Ma question est si l’idée de l’identité arabo-musulmane n’est rien d’autre qu’un mensonge alimenté par les pro-islamistes et les pro-arabes? Est-ce que nous sommes vraiment des arabo-musulmans ?

Loin de toute polémique du complot d’effacement identitaire, un peuple qui ne peut pas définir sa vraie identité est un peuple qui ne peut, ni se libérer ni évoluer et qui ne pourra pas arriver à une civilisation humaine digne de notre temps. Un peuple sans identité réelle est un peuple sans histoire, donc forcement, sans avenir, il va de soi qu’un peuple qu’on lui impose une identité est un peuple sans dignité.

Avant de savoir qui nous sommes, il faut d’abord définir ce que c’est que l’identité. Cette dernière peut définir un peuple, un groupe ou un pays ? Sur quels critères se base l’identité réelle d’un peuple ? Est-elle si importante pour un individu ? L’identité est primordiale pour pouvoir avancer ?

Se tromper sur la définition de l’identité nous empêcherait certainement d’avancer, alors, essayons d’approcher tous ces concepts.

L’identification d’un peuple est comme l’identification d’un individu, une personne qui ne connaît pas son sexe ne pourra choisir son orientation sexuelle et un peuple qui ne connaît pas son identité ne pourra pas choisir son orientation culturelle.

L’être humain et quel qu’il soit, a besoin d’être identifié au point de vue individuel ou social afin de pouvoir avancer vers l’avant et surtout dans la bonne direction, sinon, il va vivre la crise d’identité qui le bloquera sur tous les plans.

Définition simple de l’identité selon le dictionnaire : “Ce qui détermine une personne où un groupe, données qui déterminent chaque personne et qui permettent de la différencier des autres, L’identité regroupe les façons dont les individus ou les groupes se définissent par eux-mêmes, et sont définis par autrui”.

L’identité n’est pas que l’on prononce seulement ou que l’on peut imposer, mais elle est bien une réalité qui émane de l’intérieur et commode à la pratique à l’extérieur, il ne suffit pas de dire ou d’être convaincu d’être un homme ou une femme, mais il faut que le comportement arrive à en convaincre l’entourage de l’identité de la personne même. Il en va de même pour l’identité collective : il ne suffit pas simplement de le dire, mais plutôt de vivre cette identité, non pas uniquement dans le présent, mais dans le passé et à travers l’histoire également.

Il y a plusieurs critères pour définir un peuple ou un groupe, on se contente des plus importants, cités dans l’histoire :

1 – Critère du sang ou de la couleur de la peau : Ce critère est le plus ancien et remonte au temps de l’âge animal, comme pour la différence entre deux sortes d’animaux et la différence entre deux êtres humains, ce critère est utilisé dans l’histoire pour différencier les peuples sur des bases héréditaires et physionomiques.

Ce critère a causé des massacres dans l’histoire et de l’esclavagisme ainsi que des crimes racistes et des génocides, aujourd’hui et suite à l’évolution de l’esprit humain, ce critère est considéré comme raciste et inhumain. Toute personne ou un groupe s’identifiant par ce critère est condamné par les esprits civilisés.

2 – Critère religieux, des croyances et critères idéologiques : Ce critère est évolutif par rapport à son précédent, il est apparu dans l’histoire pour faire opposition au critère racial, et explique que l’identité d’un peuple se définit par rapport à la croyance: C’est constaté chez les chrétiens, mais plus clairement dans l’islam sous la notion d’el umma.

Ce critère a permis de créer des empires despotiques et impérialistes dans l’histoire dans lesquelles les minorités religieuses ou idéologiques sont opprimées et détournées au silence et à la soumission dans la majorité. Ce critère du religieux se considère plus dangereux que le critère de la race, il se base plutôt sur les idées que sur l’apparence.

Ce critère est apparu en dernier et partage les peuples selon la langue et la culture, il ne prend pas en compte le sang ni la physionomie ni les croyances, mais la langue parlée et ce que véhicule cette langue comme comportement social et culturel et qui crée une identité des peuples, comme les Kurdes, les Berbères, les Basques, les Arabes…

Ce critère et malgré son évolution par rapport aux précédents reste imparfait, car il limite d’un côté la liberté des individus à choisir leurs identités, de l’autre côté, il permet de créer des groupes fermés sur eux-mêmes et qui refusent toute évolution, ce qui s’en suit, ce sont des états nationalistes qui interdisent la diversité culturelle et linguistique. Le monde aujourd’hui vit dans cet état de préservation culturelle et linguistique et une division du monde en des pays.

Cette situation a créé dans certains de ces pays une injustice envers les minorités culturelles et linguistiques, surtout quand l’état d’un pays prend une identité culturelle unique ou principale et une langue officielle majoritaire, ce qui a engendré beaucoup d’effacement et de disparition des langues et des cultures, on prévoit une impasse à laquelle va se heurter le monde dans l’avenir.

3- Critère du sol et du territoire :Critère nouveau et avant-gardiste qui se base sur le droit du sol, quelle que soit l’appartenance de la personne, sa religion, sa langue ou sa culture. La personne est considérée citoyenne à part entière dans un pays et un état qui respecte toutes les cultures et toutes les langues et dialectes ainsi que toutes les croyances et les idéologies, dans cette atmosphère diversifiée, vivra tout personne sur le sol d’un pays sans aucune injustice.

Ce seul critère est pris en considération comme critère d’identité dans l’histoire, dans le présent et dans le futur. À travers l’histoire, les idéologies, les croyances et les personnes changent par contre, la terre ne change pas. Jean-Marie Adiaffi a cité, “Rien ne vaut la force de l’amour de l’homme pour sa terre, sa forêt, ses fleuves, ses montagnes, ses rochers, ses arbres, ses oiseaux, ses pierres.

En se basant sur ce critère du droit du sol, on peut avoir des pays civilisés qui avancent vers un avenir sans aucune discrimination tout en acceptant la différence qui est née du multiculturalisme, celle qui fait la richesse réelle d’un pays. Avec certainement cette identité réelle, on pourra se créer une union équilibrée et claire afin d’être reconnu et s’identifier par rapport à l’autre, cette dernière doit se baser sur l’endroit géographique, seul critère stable à travers l’histoire, la race, l’identité et les croyances étant présentes sur la terre, une terre sur laquelle nous vivons depuis toujours.

Cela-dit, quelles que soient l’origine, la croyance, la langue ou la culture, le citoyen doit être reconnu à part entière et avec dignité sur la terre qu’il a choisie où vivre.

Quand on prend l’exemple de la Tunisie, on peut dire que chaque personne se sent tunisienne à part entière dans sa chaire et dans son esprit quelles que soient son origine ou sa croyance et se considère tunisienne nord-africaine, je crois à la toute-puissance de la terre sur laquelle nous vivons.

La race n’est pas dans le sang ni dans les croyances ni dans la langue, mais elle est ultimement liée à la terre et à l’atmosphère de cette terre: c’est notre origine et la base de notre conception, c’est ce qui a fait notre propre culture, c’est le trait d’union entre les hommes et les femmes. Le symbole de la culture naît dans la considération des lieux où elle est née. Aimer un lieu doit se refléter à travers le respect dans les comportements et les attitudes de la personne envers ce lieu-là. Ce dernier qui n’est rien d’autre que la terre qui nous donne l’identité dont on est fier.

Quand on se pose la question à propos des Arabes installés au nord de l’Afrique, sont-ils les mêmes aujourd’hui ? Ils se sont certainement mélangé avec les Turcs, les Romains, les Phéniciens, mais aussi les Français, bref, tous ceux qui ont vécu sur cette terre, pour former les Nord-Africains.

Serait de même pour un Africain qui habitera plusieurs siècles en Europe, il sera finalement un Européen. Logiquement, nous pourrons dire aujourd’hui que Maghrébins, Libyens et Mauritaniens ne sont pas des Arabes, mais ils sont réellement des Nord-Africains, qu’ils soient différents par la race, la couleur ou la langue, la religion ou les croyances, ils vivent sur la terre du nord d’Afrique et respirent l’air du nord d’Afrique.

Nous ne rejetons pas nos origines, nous ne nions pas d’où nous venons, car les civilisations précédentes méritent tout respect et toute reconnaissance.

Pensons plutôt à la vie actuelle et aux générations futures, qui ne cessent de se projeter et de côtoyer le monde entier sans se soucier des frontières et de ses limites, pour devenir ce qu’elles veulent et réaliser le rêve d’être libre et d’appartenir à la terre et au droit du sol, sans jamais s’arrêter aux particularités.

Dire que les Nord-Africains ne sont que des Arabes ou que des Magrébins, c’est nier l’origine de la terre et nier notre histoire avant l’arrivée des Arabes et de l’islam, le nord d’Africain existait bien avant les Arabes et l’islam et demeure jusque-là sur cette terre. Il ne faut surtout pas nier notre identité réelle qui va nous permettre d’évoluer et d’aller vers l’avant, sinon, nous allons tomber dans l’illusion de la fausse identité.

Aujourd’hui, l’identité arabo-musulmane est celle qu’affiche la majorité comme unique identité, par ignorance, par dogmatisme religieux ou même nationalisme. Cette identité n’est qu’un mythe et un mensonge inventé afin de cacher la vraie identité, celle qui existait bien avant l’arrivée de l’islam et des musulmans. C’est une injustice envers l’autre et envers le berbère qui revendique dans son combat sa présence, et une discrimination des non musulmans sur cette terre.

Les valeurs de l’islam et de cette identité arabo-musulmane effacent notre identité réelle et ne gardent que ce que l’islam retient, pour nous empêcher d’être fiers en dehors de l’islam et des Arabes.

Finalement, notre identité réelle a été arabisée et islamisée sans nous donner le choix d’être ce que nous étions avant l’islam et ce que nous voudrons être. Le peuple tunisien est nord-africain et humain, un peuple diversifié et varié dans ses valeurs, ses origines et ses opinions, il doit se sentir libre à travers le droit du sol sans avoir honte ni avoir peur.

Le citoyen tunisien doit l’être à part entière, quelqu’un qui aime cette terre, son air et son âme, quelle que soit son origine, sa langue ou ses croyances, sans pour autant appartenir à la majorité ou nier les minorités. Toute personne a le droit de choisir son identité et de changer par soi-même, sans être accusé de traître ou autre.

L’identité est fortement liée au sol et à la terre ; à vous de méditer le sujet et de conclure par vous-même, ce qui pourrait nous faire avancer et non reculer.

Par : Mohamed Karim Labidi

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